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Dans l'atelier de Nase Pop

Nase Pop est un artiste hollandais basé à Buenos Aires en Argentine, il a récemment rejoint Art Shortlist. Pour vous faire découvrir l'univers de cet artiste multidisciplinaire qui explore les formes, nous sommes allés à sa rencontre dans son atelier.

Art Shortlist
par Art Shortlist - 8 mars 2022

Interview avec Nase Pop

Bonjour Nase Pop, comment l'art est-il entré dans votre vie ?

J'ai grandi dans une maison où il y avait toujours un grand intérêt pour toutes les formes d'art, des antiquités aux œuvres contemporaines en passant par l'architecture. Ma mère m'a toujours expliqué et montré l'importance de l'art.


Vous vivez en Argentine depuis 2008, pourquoi avez-vous décidé de quitter les Pays-Bas pour l'Argentine ?

Ma femme est originaire de Buenos Aires, nous nous sommes rencontrés à Barcelone et c'est elle qui m'a fait découvrir son pays. Après avoir fait plusieurs allers-retours, il était évident que je devais m'y installer.

Nase Pop travaillant sur une peinture murale

L'Argentine a une énergie que l'on ne trouve pas en Europe et, en tant que graffeur, la liberté de peindre dans les rues a été une raison déterminante pour rester.

Buenos Aires est une ville désorganisée mais surprenante, pleine de possibilités, et par rapport aux Pays-Bas, pays hyper réglementé et strict, c'était quelque chose dont j'avais vraiment besoin à ce moment de ma vie.


Quelle est la signification de votre nom "Nase Pop" ?

Au moment où j'ai commencé à devenir plus enthousiaste avec le graffiti (très jeune), j'avais besoin d'un nouveau surnom, quelque chose que je ne voulais pas associer à mes premiers projets. Même si j'ai toujours peint des noms et des mots différents parce que j'aime jouer avec des combinaisons de lettres différentes, Nase m'est resté en tête et il constitue le fil rouge qui relie tous mes travaux.

Pop est arrivé bien plus tard. Moi et un groupe d'amis avec qui je peignais surtout des trains à l'époque avons formé un crew Pirates on Probation. Pop Crew. Et les deux se sont transformés en un seul, Nasepop !


Vous travaillez avec de nombreux supports et de nombreuses techniques artistiques, en affectionnez-vous une plus que les autres ?

J'aime être partout et travailler sur différents projets en même temps. Je m'ennuie facilement, alors j'ai besoin de passer d'un médium à l'autre : murs, graffitis ou œuvres en atelier.

Circle 01, Circle 02 et Circle 03, Nase Pop, 2020

Chaque processus me procure des moments palpitants très différents. Par exemple, avec mes peintures, c'est la préparation que j'apprécie, la mise en place du dessin et la disposition sur la toile, puis la pulvérisation de la peinture à la bombe sur la toile. Mais après ce moment, le processus est un peu terne et lent. Le scotchage et le masquage de chaque couleur séparément et une journée de séchage entre les deux. La plupart du temps, on ne peut même pas voir la peinture dans son intégralité à cause du scotch et du papier qui la recouvrent. Mais la sensation à la fin, quand tout est terminé et que je peux tout voir d'un coup, est sublime. Le moment où la peinture devient ennuyeuse est souvent celui où je me concentre davantage sur mes sculptures. Et je travaille souvent sur plusieurs pièces simultanément.

Le travail avec les outils et le bois est beaucoup plus direct et je peux trouver beaucoup de joie dans ce processus de création. Bâtir une pièce et la voir prendre forme est étrangement satisfaisant. Et c'est assurément quelque chose qui me stimule de plus en plus ces dernières années.


Pouvez-vous nous en dire plus sur vos premières expériences en tant que graffeur ?

Avec le recul, mes premières expériences sont plus importantes que ce que je pouvais imaginer auparavant.

Nase Pop à l'œuvre

Tout juste capable d'écrire mon propre nom étant donné mon jeune âge, j'ai trouvé un bidon d'huile pour la chaîne de mon vélo (en Hollande, c'est une chose très commune à avoir à la maison). J'ai utilisé cette substance brune semi-transparente pour écrire mon nom sur tous les murs blancs du complexe d'appartements de trois étages où j'habitait avec ma mère. Bien sûr, un voisin m'a surpris et m'a emmené chez ma mère. Deux choses importantes se sont passées. J'avais besoin d'un surnom qui n'était pas mon prénom et même si j'ai été puni, elle m'a acheté la Bible du Graffiti... ça a tout changé pour moi.


Comment définiriez-vous votre travail artistique ?

Corrugated 13, Nase Pop, 2019

Des interprétations abstraites et typographiques de mon environnement, des villes et des assemblages architecturaux.


Quels rôles jouent l'architecture et les formes dans votre pratique artistique ?

Les tracés urbains des différentes villes ou les cartes des transports publics quand je voyage dans des pays étrangers ont toujours eu un impact sur mon rapport au monde.

J'ai un lien particulier avec les bâtiments brutalistes et leur utilisation de matériaux bruts. J'ai lu un jour que le brutalisme est la musique techno de l'architecture, ses composants structurés et durs plaisent à mon tempérament hollandais... et c'étaient aussi des arrière-plans parfaits pour le graffiti lorsque ce type de bâtiments en béton était en plein déclin dans les années 80.


Les couleurs que vous utilisez ont-elles une signification particulière ? Selon vous, que doit apporter la couleur à une œuvre d'art ?

J'ai toujours été un fan des couleurs vives. La ville dans laquelle j'ai grandi et le ciel gris de la Hollande ont eu un impact profond sur ma perception des couleurs.

Les couleurs apportent émotion et vitalité autour de nous, que cela nous plaise ou non. Elle provoque une réaction. Je suis très intuitif dans le choix des couleurs et je n'opte généralement pas pour des combinaisons cohérentes, ce que je trouve plaisant.


Quelles sont vos sources d'inspiration ? Quels artistes vous influencent particulièrement ?

Avec le temps, les sources d'inspiration changent, et je pense que cela me permet de rester en éveil. Les musées, les balades en ville et les voyages sont essentiels pour rester créatif. Je ne peux pas citer un seul artiste, il y en a tellement.

À l'époque, il y avait presque tous les graffeurs et des géants intemporels comme Frank Stella. Ces dernières années, ce sont Jason Revok et Felipe Pantone qui se sont constamment réinventés, Richard Serra, David Unemoto et Gisela Colon pour leurs sculptures étonnantes, Bev Fishman pour ses formes et l'utilisation de couleurs vives, mais aussi Telmo et Miel pour leurs compositions et leur sens du détail, sans parler de leur implication dans l'architecture...


Quelle est l'œuvre d'art qui vous a le plus marqué ?

J'ai de nombreuses œuvres d'art comme référence qui sont tout simplement époustouflantes. La liste ne cesse de s'allonger, car des esprits incroyables en produisent chaque jour de nouvelles. Mais en voici quelques-unes :

  • Doug Aitken, Mirage, une installation située dans le sud de la Californie.


  • Katharina Grosse, Kaleidoscopic installation à Sydney


  • Richard Serra, East-West/West-East installation au Qatar


  • Olafur Eliasson à peu près tout...


Quels sont vos projets pour 2022 ?

Mes projets pour 2022 sont de me concentrer sur mes sculptures, d'explorer la relation entre mon travail et les nouvelles technologies (Réalité augmentée et Web3) et de continuer à créer.

J'ai plusieurs projets personnels, deux expositions et quelques interventions d'art public à l'ordre du jour, alors je suis heureux de travailler sur ces projets.


Pouvez-vous me donner une citation qui vous inspire particulièrement ?

Je ne suis pas vraiment quelqu'un qui vit au travers de citations, mais il y en a une qui me suit au quotidien.

"Always have fun" est quelque chose que je crois nécessaire pour survivre dans ce monde de fous et c'est pourquoi je me la suis faite tatouer il y a quelques années.


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